Coulmiers fut le théâtre d’une victorieuse bataille de l’Armée de la Loire menée par le général d’Aurelle de Paladines sur les troupes bavaroises dirigées par le Général Von Der Thann Rathsamhausen.
Plusieurs ouvrages commémoratifs attestent de la « victoire de Coulmiers » du mercredi 9 novembre 1870, à commencer par le monument funéraire érigé en 1876 pour accueillir et honorer les soldats morts au combat.
Bordant la route départementale, son aspect imposant et majestueux, suscite la curiosité de nombreux voyageurs.
A l’arrière du monument, à l’orée du parc, une stèle marque le passage emprunté par les « mobiles » de l’Armée de la Loire pour libérer Coulmiers.
En 1908, les vétérans de guerre bavarois ont élevé un Monument pour honorer leurs 49 compagnons d’arme inhumés dans le cimetière. Nous pouvons y lire l’épitaphe suivante :
« A l’honorable mémoire des bavarois tombés à la Bataille de Coulmiers le 9 novembre 1870 ».
Petite commune de 500 habitants à l’ouest d’Orléans, Coulmiers reste le lieu d’un haut fait d’armes dans la mémoire collective. C’est là que le 9 novembre 1870, l’ « Armée de la Loire » remporte une victoire inédite.
Une bataille épique. Le 19 septembre 1870, alors que Paris est encerclé par les Allemands, le gouvernement provisoire de la République française souhaite faire libérer la capitale par l’ « armée de la Loire ». Afin de ne pas être pris en revers au sud de Paris, l’ennemi envoie le corps d’armée bavarois commandé par le général Von Der Tann attaquer Orléans. La ville est prise les 10 et 11 octobre. Mais deux jours auparavant, Gambetta arrive à la délégation de Tours, où il organise une armée de secours, dite « armée de la Loire ». Composée d’hommes venus de toute la France (troupes de ligne, mobiles des départements, francs-tireurs, etc.), elle est placée sous les ordres du général d’Aurelle de Paladines. Le 15e corps est formé à Salbris sous les ordres d’Aurelle, le 16e corps à Blois, sous ceux du général Chanzy.
Gambetta veut alors reprendre Orléans, première étape vers Paris. Le 15e corps passe sur la rive droite de la Loire à Beaugency et fait sa jonction avec le 16e corps. Quant aux Allemands, ils évacuent Orléans le 8 novembre et se fortifient entre Saint-Péravy-la-Colombe et Meung-sur-Loire. D’Aurelle veut enfermer les Allemands dans un cercle de feu devant Coulmiers. Pour la première fois, la supériorité est aux Français, avec 65 000 hommes et 150 canons contre 22 000 Allemands et 110 canons…
Victoire sans lendemain ? Le 9 novembre, vers 8h du matin, par un froid vif et un épais brouillard, l’attaque française est énergique. Les soldats du général Peitavin s’élancent contre les Bavarois retranchés à Baccon. A la baïonnette, ils enlèvent le village. Vers 14h, l’ennemi est acculé à Coulmiers. Vers 15h, les troupes du général Barry rejoignent celles de Peitavin. Mis en batterie, les canons du général Duriés ouvrent un feu terrible. En criant « Allons enfants, suivez-moi ! », Barry entraîne les mobiles de la Dordogne à l’assaut. La victoire est aux Français : les pertes s’élèvent à 1 500 tués ou blessés et 200 disparus ; les Allemands ont 800 hommes hors de combat et 2 000 faits prisonniers.
Mais les Français laissent passer l’occasion de cerner l’ennemi, qui s’enfuit la nuit venue. Coulmiers reste une victoire inachevée. Pourtant le 10 novembre à Sainte-Croix, Mgr Dupanloup célèbre le Te Deum de la délivrance d’Orléans. Comme en 1429 celle-ci allait-elle décider du sort de la France ? Problème : d’Aurelle retarde de 15 jours sa marche vers Paris ; il a alors face à lui 120 000 Allemands dotés de 400 canons. L’ « armée de la Loire » est bloquée à Beaune-la-Rolande le 28 novembre, battue à Loigny le 2 décembre, et à Orléans le 6 décembre.
Coulmiers après Coulmiers. L’humiliation de la défaite finale est transfigurée grâce à l’héroïsation de la victoire de Coulmiers, dès lors commémorée chaque année. Pour le premier anniversaire une médaille est frappée. Nombreuses sont les villes qui donnent à des rues les noms de Coulmiers et des mobiles. En 1874, le Comité de secours aux blessés lance une souscription nationale pour un monument. Dressé à l’angle nord-ouest du parc du château de Coulmiers, il est inauguré en 1876. En 1895, alors que la France est redevenue une grande puissance, la cérémonie du 25e anniversaire de Coulmiers est grandiose. En fait, la célébration de Coulmiers fait office de substitution à une revanche militaire que les Français ne souhaitent pas vraiment, mais dont ils ne veulent ne pas abandonner l’idée.
Le 8 novembre 1970, le centenaire de l’anniversaire de Coulmiers donne lieu à une imposante commémoration, mais, cette fois-ci, en présence d’un prélat allemand. Puis, en juillet 1971, campant dans le parc de Coulmiers, vingt jeunes Allemands œuvrent à l’entretien des tombes allemandes au nom de l’amitié « Uber den Gräbern ». Coulmiers, victoire a priori sans lendemain, aurait-elle été porteuse, comme Verdun plus tard, d’une future réconciliation franco-allemande ?
J.-M. Flonneau